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Prendre la décision de dévoiler un trouble de santé mentale

26 novembre 2015
 - 
par Kharoll-Ann Souffrant

Prendre la décision de dévoiler un trouble de santé mentale

Il y a cinq ans, on m’a diagnostiqué un trouble de santé mentale. Cela n’a pas causé de surprise à ma famille ni à mon entourage qui avaient été témoins de ma longue descente aux enfers, débutée dès mon enfance. Aujourd’hui, je mène une tout autre vie. Je suis heureuse, épanouie et je prends part activement à la vie en société.

J’accomplis un grand nombre de choses dont je ne me serais jamais crue capable antérieurement. J’entre en relation avec les autres avec une aisance inespérée dont je sous-estimais la portée.

Une large part de mon entourage, principalement de nouvelles personnes s’étant ajoutées à mon réseau social après l’annonce de mon diagnostic, ignore actuellement les déboires que j’ai subis ainsi que tout le chemin que j’ai parcouru pour en arriver là où j’en suis maintenant. On me répète souvent à quel point je suis chanceuse dans la vie ; à quel point tout semble arriver à point nommé pour moi. Comme si ça coulait de source. Comme si je n’avais pas eu d’efforts, de travail et de remises en question à faire pour réussir à trouver le bonheur.

Mais est-ce ma faute si les gens ont cette vision de moi ? Suis-je hypocrite de taire cette partie sombre de mon passé ?

 

 

Est-ce que mon bonheur est une illusion ?

Ce sont des questions que je me pose parfois. Non, mon bonheur n’est pas une illusion. Ce que j’affiche et dégage est bel et bien réel. Or, la nuance que je veux apporter est la suivante : il est plutôt le résultat d’un parcours parsemé d’épreuves et de difficultés dont la plupart des gens n’ont pas conscience, parce que j’ai fait le choix, jusqu’à présent, de ne pas en parler. De crainte d’être incomprise, de crainte d’être prise en pitié, de crainte de paraître « faible ». Oui, j’ai encore du mal à composer avec mon côté vulnérable, même vis-à-vis moi.

Comment dévoiler sa maladie mentale à son entourage ?

Voilà cinq ans que je réfléchis à la possibilité de faire un « coming out » plus formel. J’ai longuement soupesé les pour et les contre. J’ai abordé la question avec les membres de ma famille. Pendant de longs mois, j’en ai discuté en thérapie, en tentant d’évaluer quelles en seraient les conséquences pour moi à court, moyen et long termes.

J’ai pris l’initiative de contacter plusieurs personnes plus ou moins connues, qui ont fait le choix d’afficher leur propre expérience en ce qui a trait à la maladie mentale, pour savoir ce qu’elles éprouvent depuis leur « coming out ». Présentement, je considère plusieurs projets, en lien avec ce thème, qui me permettraient de partager ma propre histoire, mais je ne peux pas encore mesurer l’ampleur des impacts que cela impliquerait. Toutefois, ma décision est bel et bien prise : je veux prendre la parole et me dévoiler.

Il est possible de se rétablir d'un problème de santé mentale

J’ai compris bien des choses sur le rétablissement en santé mentale, non seulement par mon expérience personnelle, mais aussi, par mon expérience professionnelle en intervention sociale. Je tiens à livrer un message fort par cette démarche qui aura des répercussions durant le reste de mes jours.

Je veux aider d’autres jeunes adultes, qui se trouvent dans la même situation que moi et qui vivent actuellement dans la honte et la culpabilité. Je veux tendre la main à tous ceux qui ont peur d’être jugés. Je veux faire savoir qu’il est possible de se rétablir, mais que ça nécessite énormément de motivation et de persévérance, et que ça ne se réalise pas comme par magie. Mais, d’abord et avant tout, c’est pour moi que je veux le faire, car je tiens à vivre ma vie avec une plus grande authenticité. J’aspire à des relations beaucoup plus profondes et vraies avec les gens de mon entourage – qui me témoignent déjà un amour et une confiance qui me touchent droit au cœur.

Dévoiler un aspect sombre de sa vie

Et pour dévoiler vraiment qui je suis, je devrai révéler certains aspects de ma vie, que j’ai gardés cachés jusqu’ici, parce que je les aime moins, je les trouve encore laids », mais qui ont forgé la femme que je suis aujourd’hui. Une grande beauté peut naître de ce qui est imparfait, tenons-nous le pour dit.

Je me sens prête à accueillir le succès et à affronter les tempêtes qu’occasionnera le choix que j’ai fait, parce que ce choix correspond avec mes valeurs les plus fondamentales, les plus profondes. C’est pourquoi je suis persuadée que les gains seront, à mes yeux, plus importants que les pertes.

Prendre la décision de dévoiler un trouble de santé mentale n’est sans doute pas possible pour tout le monde. Mais si toutes les personnes rétablies restent dans le placard, la population continuera à percevoir une image déformée de ce que sont la santé et la maladie mentales.

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